Un Trésor Numismatique et Historique
La pièce de 20 francs, introduite en 1803 sous l'impulsion de Napoléon Bonaparte, s'inscrit dans le cadre d'une réforme monétaire ambitieuse visant à moderniser l'économie française après la Révolution. Cette réforme, codifiée par la loi du 7 Germinal An XI (28 mars 1803) sous le Consulat, a établi les fondements du système monétaire français pour les décennies à venir.
Les spécifications techniques de la pièce ont été soigneusement définies : une finesse de 900 millièmes d'or, un poids de 6,45 grammes (dont 5,805 grammes d'or pur), un diamètre de 21 mm, et une épaisseur de 1,3 mm. Conçue pour remplacer le louis d'or, la pièce de 20 francs Napoléon est rapidement devenue un pilier central de l'économie française, incarnant la transition de la monarchie à l'empire.
L'Extension Européenne : L'Influence de l'Union Latine
Au-delà des frontières françaises, la pièce de 20 francs Napoléon a joué un rôle clé sur la scène monétaire européenne grâce à l'Union latine, une union monétaire créée en 1865. Cette alliance, réunissant la France, la Belgique, l'Italie, la Suisse, et plus tard la Grèce, visait à harmoniser les systèmes monétaires des pays membres. Les pièces d'or Napoléon, avec leurs caractéristiques standardisées, étaient parfaitement alignées avec les critères de l'Union latine, facilitant leur circulation dans toute l'Europe. Cette standardisation a non seulement renforcé la stature internationale de la pièce de 20 francs Napoléon, mais elle a aussi permis à d'autres pays de s'inspirer de ce modèle pour leurs propres monnaies, comme le 20 francs Vreneli en Suisse ou la lire Marengo en Italie.
Frappée sans interruption jusqu'en 1914, la pièce de 20 francs Napoléon a évolué avec les régimes politiques français : du profil de Napoléon Ier aux effigies de Louis XVIII, Charles X, Louis-Philippe, et Napoléon III. Sous les régimes républicains, les effigies royales ont été remplacées par des symboles républicains, reflétant les idéaux de liberté, d'égalité et de fraternité.
Chronologie des Pièces d’Or
20 Francs Cérès (Frappes : 1849 - 1851)
Le 20 francs Cérès n’a été produit que pendant trois années, de 1849 à 1851. Cette pièce a été introduite sous la Deuxième République française, qui a vu le jour après l'abdication du roi Louis-Philippe Ier en faveur de son petit-fils. Cependant, la Deuxième République fut de courte durée, abolie en 1851 par Louis-Napoléon Bonaparte, qui devint ensuite empereur, marquant ainsi le début du Second Empire.
L'avers de la pièce Cérès arbore l'effigie de Cérès, la déesse romaine de l'agriculture et de la fertilité, symbolisant l'abondance et la prospérité. Son image, couronnée d'épis de blé, incarne la richesse agricole et la connexion profonde entre la terre et la vie. Au revers, on retrouve la devise "Liberté, Égalité, Fraternité", un héritage de la Révolution française. 
Les Pièces d’Or Napoléon III
- Louis Napoléon Bonaparte (Frappes : 1852)
La pièce frappée sous Louis-Napoléon Bonaparte montre son effigie entourée de l’inscription "Louis-Napoléon Bonaparte". Le revers affiche la valeur nominale "20 francs" au centre d’une couronne de laurier, avec l’inscription "République française" autour.
- Napoléon Tête Nue (Frappes : 1853 - 1860)
Frappée entre 1853 et 1860, la pièce "Napoléon Tête Nue" présente l’inscription "Napoléon III Empereur" sur l’avers et "Empire Français" sur le revers, affirmant ainsi le caractère impérial du régime.
- Napoléon Tête Laurée (Frappes : 1861 - 1870)
La pièce "Napoléon Tête Laurée", émise de 1861 à 1870, montre l’empereur avec une couronne de laurier sur l’avers. Ce symbole, hérité de la tradition romaine, ancre Napoléon III dans une lignée impériale prestigieuse, renforçant sa légitimité. Le revers rassemble des symboles impériaux, comme l'aigle, la couronne et le sceptre, tous entourés de l’inscription "Empire Français".
20 Francs Ange/Génie (Frappes : 1871 – 1898)
Les pièces d’or "Génie", également connues sous le nom de "Ange", ont été conçues pour la première fois en 1791 sous la Première République française, et frappées pour la première fois en 1848 et 1849. Leur production a été interrompue sous le règne de Napoléon III, puis reprise après la chute de l’empire lors de la Troisième République, de 1871 à 1898.
L'avers de la pièce d'or "Ange" est dominé par la figure allégorique d'un Génie ailé, parfois appelé "Ange". Ce Génie est représenté debout, en pleine action de graver une constitution sur une tablette posée sur un piédestal. Il incarne la République et les idéaux révolutionnaires français. Le revers de la pièce présente la valeur nominale "20 Francs" au centre, entourée d'une couronne de laurier, symbole de la victoire et de la gloire. Autour de la couronne, on trouve l'inscription "LIBERTÉ ÉGALITÉ FRATERNITÉ", la devise de la République française.
Anecdote
Une légende entoure la pièce Ange : son créateur, Augustin Dupré, aurait échappé à la guillotine pendant la Terreur grâce à cette pièce qu'il portait sur lui. Selon la rumeur, la lame de la guillotine ne serait pas tombée, ce qui aurait sauvé sa vie. Bien que cette histoire soit peu probable, il est plus plausible qu'il ait réussi à soudoyer son gardien avec la pièce pour obtenir sa liberté. Cette histoire a néanmoins contribué à forger la réputation de porte-bonheur de cette pièce. Certains racontent même que la défaite de Napoléon Bonaparte à Waterloo serait due à la perte de sa pièce Ange, qui lui avait auparavant porté chance.
Le 20 Francs Marianne Coq (Frappes : 1899 - 1914)
La pièce de 20 francs "Marianne Coq" est une des plus emblématiques de la Troisième République. Frappée entre 1899 et 1914, cette pièce en or est non seulement un témoignage de l’histoire monétaire de la France, mais aussi un investissement apprécié des numismates.
L'avers de la pièce est dominé par l'effigie de Marianne, un symbole puissant de la République française. Marianne porte un bonnet phrygien orné d'une couronne de laurier, évoquant la victoire et la liberté. Le bonnet phrygien, traditionnellement associé à la Révolution française, incarne les idéaux de liberté et de révolte contre l'oppression. La gravure de Marianne est entourée de l’inscription "République Française", affirmant les valeurs républicaines que la pièce représente.
Le revers de la pièce présente un majestueux coq gaulois, un autre symbole national français, se tenant fièrement sur ses pattes. Le coq, emblème de vigilance et de courage, est représenté de manière réaliste, avec des plumes finement détaillées. Il est entouré de l’inscription "Liberté, Égalité, Fraternité", la devise de la République française, inscrite en arc de cercle. En dessous du coq, on trouve la valeur faciale "20 Fcs" ainsi que l'année de frappe.
Refrappes Pinay
La pièce "Marianne Coq" est également remarquable pour avoir été refrappée entre 1951 et 1960, lors de ce que l'on appelle les "refrappes Pinay". Après la Seconde Guerre mondiale, les stocks d'or étaient fondus ou endommagés, et la Banque de France décida de rouvrir le marché de l'or pour relancer l'économie. Pour ce faire, elle remit en circulation cette pièce emblématique, en utilisant les matrices originales et en réutilisant les millésimes gravés entre 1907 et 1914. Au total, 37 millions de pièces en or de 20 francs "Marianne Coq" furent refrappées.
Conclusion
L'exploration des pièces d'or 20 Francs Français révèle non seulement la richesse historique et symbolique de ces objets numismatiques, mais aussi leur rôle central dans l'évolution monétaire et politique de la France. De la pièce de 20 francs Napoléon, introduite par Napoléon Bonaparte pour stabiliser et moderniser l'économie française, aux pièces "Génie" et "Cérès" qui témoignent des soubresauts républicains, en passant par les diverses émissions sous Napoléon III et la célèbre "Marianne Coq" de la Troisième République, chacune de ces pièces raconte une histoire unique.
En somme, les pièces d'or Napoléoniennes sont bien plus que de simples monnaies ; elles sont des témoins précieux de l'histoire française, reflétant les transformations politiques et économiques du pays. Leur richesse symbolique, leur valeur artistique et leur importance numismatique continuent de fasciner collectionneurs et investisseurs, faisant de ces pièces des trésors intemporels du patrimoine français.
